Pour contourner les détecteurs d’IA, des étudiants ajoutent volontairement des fautes à leurs devoirs

Au cœur des campus, un phénomène pour le moins surprenant attire l’attention des enseignants : certains étudiants introduisent délibérément des fautes d’orthographe dans leurs dissertations pour berner les systèmes de détection de l’intelligence artificielle. Plutôt que d’appliquer une révision minutieuse, ils préfèrent semer quelques coquilles pour donner à leur travail l’apparence d’un texte rédigé à la main. J’ai découvert cette astuce en discutant avec un ancien camarade de licence en lettres, qui m’a confessé que lors de ses partiels, il relisait ses devoirs à rebours pour préserver l’illusion d’un style 100 % humain.

Des fautes volontaires pour éviter les détecteurs d’IA

L’idée peut paraître contre-intuitive : pourquoi rendre son travail moins bon alors que le but est justement d’obtenir une meilleure note ? D’après des échanges entre étudiants de plusieurs universités, si un correcteur automatique (comme ceux développés par des organisations telles que Turnitin ou Urkund) signale un taux trop élevé de rédaction robotique, l’étudiant se retrouve interrogé sur l’originalité de son texte. L’astuce consiste donc à générer d’abord le corps de texte avec un chatbot, puis à parcourir l’ensemble du document pour y glisser quelques erreurs mineures – accords approximatifs, choix de mots peu justes, ou ponctuation maladroite. En ajoutant ces imperfections, le document paraît plus « naturel », ce qui réduit le score d’IA détectée.

J’ai moi-même remarqué, en tant que tuteur bénévole auprès d’étudiants en journalisme, que certains me demandaient conseil pour « humaniser » leurs travaux. L’un d’eux m’a même montré comment il utilisait un script simple pour remplacer automatiquement certains mots par des synonymes imparfaits, histoire de perturber les algorithmes de reconnaissance. Cette stratégie, quoique astucieuse, pose des questions éthiques : plutôt que d’améliorer leurs compétences en écriture, ces étudiants consacrent leur temps à peaufiner la tricherie académique.

L’avis des enseignants

Du côté des professeurs, le sentiment oscille entre la frustration et l’inquiétude. Sam Williams, chargé de cours en études américaines, raconte que lorsqu’il compare les premières versions back-to-back des dissertations—les copies soumises sans modification puis celles « optimisées »—il remarque des incohérences flagrantes. L’anecdote la plus marquante ? Un devoir sur l’histoire du jazz en Louisiane mentionnait Elvis Presley comme figure centrale de la scène musicale : un non-sens historique ! Même un lycéen passionné de musique pourrait rectifier cette erreur après quelques minutes de recherche. Cette situation illustre la dérive : à force de bricoler pour contourner les détecteurs automatiques, les étudiants sacrifient la rigueur et l’apprentissage véritable (Ministère de l’Enseignement Supérieur, 2024).

En discutant avec d’autres enseignants, j’ai compris qu’il ne s’agit pas seulement de fausser la détection : beaucoup demandent à l’IA de simplifier volontairement le style, en lui donnant pour consigne d’écrire « comme un étudiant de première année un peu maladroit ». Une étudiante révélait sur les réseaux sociaux qu’elle préférait ainsi obtenir un rendu plus « crédible » aux yeux des logiciels. Pourtant, cette méthode détourne l’objectif principal d’un devoir : démontrer sa compréhension et sa capacité de réflexion personnelle.

Un réflexe de facilité

Les motivations derrière cette pratique sont variées. Nombre d’étudiants expliquent qu’ils sont débordés par la charge de travail et voient dans l’outil IA un moyen rapide d’éviter de passer des heures à rédiger. « Quand j’étais en licence, j’ai souvent reçu des messages du genre : ‘Je n’ai pas le temps d’écrire, je préfère m’assurer au moins qu’ils n’attrapent pas que c’est un texte généré ’, raconte une amie, aujourd’hui diplômée d’un master en communication. » Pour eux, jouer avec les algorithmes devient plus simple que de développer leur plume. Pourtant, plusieurs études (OCDE, 2023 ; UNESCO, 2024) soulignent que ce réflexe de facilité peut nuire à l’acquisition de compétences essentielles comme l’esprit critique ou la capacité à argumenter.

Cet engouement pour l’IA et la volonté d’y échapper en y faisant subir une double manipulation témoignent d’un paradoxe : l’étudiant jongle entre la séduction d’un outil puissant et la peur d’en être démasqué. À terme, c’est tout le sens même de l’intégrité académique qui est mis à mal.

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