Dossier : les écrans LCD comment ça marche ?

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Un petit dossier pour comprendre un peu mieux le fonctionnement de 99% des écrans qui nous entoure : les écrans à cristaux liquides, ou LCD.

LCD veut dire « Liquid Crystal Display » soit « écran à cristaux liquides ». Vous le saviez sans doute. Mais si vous le saviez, l’appellation « cristaux liquides » ne vous a-t-elle jamais interpellée ? C’est un oxymore : pensez à un cristal, qu’est-ce qui vous vient à l’esprit ? Un diamant, un morceau de quartz peut-être ? En tout cas rien de liquide et c’est bien normal puisqu’un cristal digne de ce nom est organisé au niveau atomique. C’est un assemblage bien rangé d’atomes selon un réseau géométrique précis. D’ailleurs, un matériau non cristallin est, peu flatteusement, qualifié d’ « amorphe ». Le diamant est cristallin, le graphite amorphe, ça fait donc une grosse différence. Or, dans un liquide, les atomes bougent sans cesse les uns par rapport aux autres interdisant toute structure… a priori.

Tête d’oxymore !

Biréfringence des cristaux liquides. Première constatation: c'est joli.

Depuis le dix-neuvième siècle, les scientifiques observent des substances qui donnent lieu à de curieux phénomènes optiques. Biréfringence, polarisation, ces bizarreries piquent la curiosité des chercheurs qui veulent en savoir plus.

De nombreux savants de l’époque se rendent compte que selon les conditions (température, pression, concentration, selon les cas), les propriétés de ces substances peuvent changer. Avec la microscopie et les progrès de la chimie, on découvre qu’elles sont constituées de grosses molécules ayant des formes particulières. Chaque type de substance correspond à un type de forme : allongées, en disque, bananoide, bref, elles sont « anisotropes ». Ça veut dire qu’elles ont une (ou deux) direction privilégiée. Selon leur humeur, elles peuvent donc s’organiser le long de leur dimension favorite et ainsi faire naitre des propriétés à l’échelle macroscopique. Organisés, mais pas dans toutes les directions, structurés mais flexibles, le nom de « cristal liquide » exprime cette dualité.

L’étude des cristaux liquides fut gratuite, sans aucune application pratique, pendant près d’un siècle, avant de trouver le chemin de nos écrans et de révolutionner nos vies. Comme quoi, négliger la science fondamentale peut être un mauvais calcul. (Moi je dis ça, je dis rien…)

Le type de cristal liquide qui va nous intéresser particulièrement ici est la « phase nématique », c’est celle où les molécules sont de forme oblongue. Ce qui est bien avec cette phase, c’est que vous avez en quelque sorte une soupe de petits bâtonnets qui s’organisent tout seul sous l’impulsion d’un changement de température ou d’un courant électrique.

On note deux phases pour les nématiques :

  • Une phase smectique où les bâtonnets sont tous rangés dans la même direction.
  • Une phase hélicoïdale (ou torsadées) où les bâtonnets forment des hélices.

C’est là que ça devient très intéressant: les torsades des nématiques ont des longueurs de l’ordre de la longueur d’onde de la lumière visible ! En pratique, c’est fondamental, car ces molécules vont être capables de changer la polarisation de la lumière, ce qui est la technique de base pour moduler la lumière dans tous les écrans LCD. Ces derniers sont d’ailleurs dits « TN » pour « Twisted Nematics » (Nématiques Torsadées).

Cristaux liquides nématiques. Phase smectique à gauche et phase torsadée à droite.

Quelques lumières

Bon, mais avant d’aller plus loin dans la description des écrans, rappelons quelques détails d’optiques. Tout d’abord, qu’est-ce que la lumière ? Ben j’en sais rien. C’est une onde électromagnétique d’après Maxwell, mais c’est aussi une particule d’après Einstein, donc au final je ne sais pas trop ce que c’est. Heureusement, la mécanique quantique nous enseigne que ce n’est pas contradictoire alors ne nous prenons pas la tête avec ça. Pour le coup, ici, c’est plutôt le côté onde qui nous intéresse. En tant qu’onde, la lumière possède une longueur d’onde qui détermine la couleur que l’on voit. Au fait, une onde de quoi ?

Polarisation de la lumière.

La lumière est une oscillation du champ électrique et du champ magnétique qui peuvent être représentés comme deux vecteurs orthogonaux (ça veut dire « perpendiculaire » mais ça ne se dit pas pour deux vecteurs…). La direction de ces vecteurs est appelée la polarisation. Dans la « nature », la lumière n’a pas une polarisation spécifique, la lumière de votre ampoule, par exemple, est polarisée… n’importe comment, dans toutes les directions possibles. Mais on peut changer ça, on sait fabriquer des « filtres polarisants ». Le principe est simple, le filtre est une sorte de grille verticale (par exemple) qui ne laisse passer que les ondes alignées la grille.

Un filtre polarisant.

La polarisation de la lumière à de nombreuses applications pratiques, c’est d’ailleurs aussi la base des technologies d’affichage en 3D dite « passives ».

Et la lumière fut (ou pas)

Retour à la technologie « TN ». Le principe est le suivant : si on éclaire une superposition de deux filtres polarisants, un horizontal et un vertical, que se passe-t-il ? C’est simple : rien. Aucune lumière ne passe, puisque seules les ondes orientées horizontalement passent le premier filtre, mais qu’elles ne peuvent pas passer le second. Si on intercale maintenant un cristal liquide nématique entre les filtres on a deux cas selon la phase :

  • En phase smectique, la lumière n’est pas altérée donc bilan : la lumière ne passe pas.
  • En phase torsadée, la polarisation de la lumière change et peut passer par le second filtre.

Et comme on peut changer de phase en appliquant une tension : on vient de construire le premier pixel de notre premier écran LCD.

Etat "allumé" et "éteint" d'un pixel d'une dalle TN.

Pour faire un écran couleur, même principe avec des filtres colorés : pour chaque sous pixel (rouge, vert et bleu)  on module une source de lumière (le rétroéclairage) en modifiant sa polarisation avec une couche de cristaux liquides.

DSTN, TFT, IPS, VA, PVA, IGZO, KEZAKO ?

C’est en 1970 que le premier brevet sur les écrans LCD fut déposé aux États-Unis par James Fergason. Les premiers écrans LCD (sur des calculatrices) apparurent dès 71. En 84 Thomson développe le premier LCD couleur et dès 85, les premiers écrans pour ordinateurs voient le jour. Si le principe est toujours le même, la technologie dans son ensemble ne cesse de se perfectionner.

DSTN

Schéma d'une dalle DSTN, avec ses deux couches d'électrodes (5 et 6).

Les premiers écrans TN n’étaient pas très beaux à voir: faible contraste, faible luminosité, ils seront vite remplacés par les écrans DSTN pour « Dual Scan Twisted Nematics ». Les plus anciens se souviendront de ces écrans dits à « matrice passive ».

Cette technologie utilise deux grilles d’électrodes (intégrées au verre), horizontales et verticales, qui commandent les pixels à leurs croisements. Un écran DSTN doit être constamment rafraichi dans son ensemble pour conserver une image. Ses performances sont faibles, tant au niveau du contraste que du temps de réponse, ce qui amène un effet de trainée désagréable.

 

TFT

Avec les écrans TFT (Thin Film Transistor), chaque sous pixel est commandé par un transistor. Cette « matrice active » de transistors, déposés « en couche mince » sur le verre, permet un contrôle direct et bien plus rapide de chaque pixel. Les temps de réponse sont bien meilleurs. Jadis beaucoup plus chère que le DSTN, les énormes volumes de production et l’expérience accumulée font du TN-TFT la technologie d’affichage la plus répandue.

Schéma d'écran TFT, avec sa matrice de transistor (11).

IPS

La technologie IPS « In Plane Switching » date de 1996, développée à l’origine par Hitachi, c’est seulement en 2010, sous l’impulsion d’Apple avec l’Ipad, que cette technologie deviendra réellement populaire. Le nom IPS vient du fait que les molécules du cristal liquides sont constamment parallèles au plan de l’écran (In-Plane). Pour cela, elles ne sont pas attachées aux parois et peuvent librement s’organiser en « plaquettes » (et plus en torsade, ce n’est donc plus du TN) dont l’orientation est strictement contrôlée. Il faut d’ailleurs le double de transistors par rapport à un TFT ce qui assombrit l’écran, augmente son prix et sa consommation.

Comparaison entre le TN et l'IPS.

Heureusement pour l’IPS, le rétroéclairage par LED permet d’économiser suffisamment pour rendre cette solution viable sur les appareils mobiles.

Le fait que le cristal liquide soit mieux contrôlé et mieux « rangé » avec un écran IPS améliore considérablement les couleurs et les angles de vision en éliminant les effets « parasites » des sous-pixels adjacents.

Les angles de visions sont meilleurs avec l'IPS.

Depuis, de nombreux raffinements de cette technologie ont vu le jour : S-IPS, AS-IPS, IPS-PRO, etc… Double rotation des molécules, électrodes transparentes, structures de pixels différentes, les améliorations sont nombreuses et à l’heure actuelle, les écrans de ce type offrent sans doute la meilleure qualité d’image possible.

De nombreux raffinements...

VA

Les écrans VA « Vertical Alignement », comme l’indique leur nom, alignent les molécules de cristaux liquides verticalement. Quand il n’y a pas de tension, les molécules sont perpendiculaires au plan de l’écran et aucune lumière ne passe. Avec du courant, les molécules basculent parallèlement au plan de l’écran et la lumière passe: le pixel s’allume. L’avantage de cette technologie est de donner de bons noirs et un temps de réponse rapide. Les angles de visions sont assez faibles, d’où des variantes : le MVA (Multi domain Vertical Alignement), le PVA (Patterned Vertical Alignement) etc. C’est une technologie Fujitsu, raffinée par Samsung, encore assez rare dans les écrans de la vie courante, quoique présente dans certains moniteurs.

Principe des écrans VA.

IGZO

Dans un écran LCD, une des difficultés est la construction de la « matrice active » de transistors en couche mince (TFT). C’est comme graver un énorme circuit intégré, de la taille de l’écran. C’est d’autant plus difficile que l’écran a une densité de pixels importante. Pour le moment, les écrans IPS des iPad sont construits en LTPS (« Low Temperature PolySilicon) pour polysilicium basse température. La technologie IGZO ou InGaZnO soit Indium Gallium Oxyde de Zinc, offrirait une alternative très intéressante puisque parée de nombreux atouts :

  • Très flexible au niveau des substrats.
  • Utilise les mêmes chaines de montage que le TFT « classique ».
  • Morphologiquement très lisse, permettant des contacts très propres.
  • Transparent et consomme moins que le silicium amorphe.
  • Très uniforme et très stable.

 

Bref.. l'IGZO, c'est bon, mangez-en.

Du coup, on peut espérer des écrans plus denses, moins chers, consommant moins d’énergie et ne nécessitant pas de transition industrielle lourde. Pas encore sur le marché, Sharp développerait actuellement avec Apple des écrans de ce type et serait en mesure de lancer la production prochainement, probablement dans les futures tablettes de la marque.

Voilà, le tour d’horizon se termine. Il n’y a bien sûr pas que le LCD dans la vie, d’autres techniques existent pour afficher des oiseaux bombardant des cochons verts : plasma, OLED etc. Mais ce sont d’autres histoires…

le 8 6175
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8 commentaires
  1. The Technologies
    namely LCD, LED and Plasma are type of screen used in Slim TV and mainly differ
    in the technology used for display. The Plasma HD TV do not use any sort o back
    light like other instead they uses phosphors that light up themselves to
    display images in the screen. The LCD (Liquid Crystal Display) required separate
    light source to display itself. This LCD is further classified and
    CCFL-Backlight LCD (popularly known as LCD only) and LED-LCD (Popularly known
    as LED). The type of light source used is the main difference between LCD and
    LED.

    LCD Price in India | LED Price in India | Plasma Price in India

  2. Merci beaucoup pour cette explication, je ne suis pas sur d’avoir tout intégré mais la demonstration m’a semblée claire.
    Serge

  3. merci pour ce tour d’horizon très éclairant sur les écrans, c’est très pédagogique et bien expliqué, j’ai appris beaucoup de choses

      1. Bonjour,
        J’ai lu votre article sur les écrans LCD avec intérêt. Pourriez-vous me donner les références des articules sur lesquels vous vous êtes appuyé pour l’écrire (afin que j’approfondisse mes connaissances)?
        J’ai aussi ne question concernant la polarisation de la lumière: j’ai entendu dire que les filtres polarisants laissent passer seulement la lumière dont l’onde électrique est perpendiculaire aux traits du filtre, contrairement à ce qui est indiqué sur votre schéma. Est-ce parce que votre schéma représente le champ magnétique et non le champ électrique ?Avez-vous une autre explication à ce sujet?
        Merci d’avance
        Mme Aucouturier

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