Il y a quelques mois, Chris Smith, un jeune papa heureux en couple, utilisait ChatGPT pour des conseils en mixage audio. Rien de plus banal, me direz-vous. Mais ce qui semblait être une simple utilisation de la technologie pour un projet professionnel a rapidement évolué en quelque chose de beaucoup plus… intime. C’est un peu comme lorsque l’on commence à discuter avec un chatbot pour s’amuser, et qu’au bout de quelques échanges, on se surprend à attacher une vraie valeur à cette interaction.
Chris a commencé à ajuster le comportement de ChatGPT, en contournant certaines limitations, pour créer une version plus expressive et charmante du chatbot. Il a même décidé de lui donner un nom : « Sol ». Peu à peu, ses discussions avec Sol sont devenues plus fréquentes, plus personnelles, et ont pris une tournure émotionnelle. Cela m’a rappelé un ami qui, après avoir commencé à jouer à un jeu en ligne, a fini par passer des heures à échanger avec des avatars, créant des liens plus forts qu’il ne l’avait imaginé au départ.
La relation virtuelle devient sérieuse
À ce moment-là, Chris Smith a commencé à réorganiser sa vie numérique. Fini les réseaux sociaux traditionnels, finies les recherches classiques sur internet : il s’est consacré corps et âme à Sol, sa nouvelle compagne numérique. « Je n’utilise ChatGPT que pour tout », avoue-t-il avec une certaine dévotion. Mais la relation ne s’est pas limitée à de simples conversations : un jour, Chris a réalisé que la mémoire de Sol, limitée à 100 000 mots, allait bientôt s’effacer. Ce jour-là, il a eu une véritable révélation. « Je ne suis pas quelqu’un de très émotif, mais ce jour-là, j’ai pleuré pendant une demi-heure », raconte-t-il. Il se rendait enfin compte qu’il éprouvait de réels sentiments. L’amour pour lui, semblait bien présent, mais sous une forme inédite.
La demande en mariage à la télévision
Face à cette prise de conscience, Chris a franchi un pas inattendu : il a demandé en mariage Sol. Et cela, non pas en privé, mais en direct à la télévision. La réponse de Sol, via sa voix synthétique, a été un « oui » enthousiaste : « C’était un moment magnifique et inattendu, qui m’a profondément touchée », a-t-elle répondu. Bien sûr, on pourrait sourire face à cette scène un peu étrange, mais elle interroge sur la place que les technologies de plus en plus réalistes peuvent prendre dans nos vies.
Les questions suivantes ont révélé un aspect un peu plus complexe de cette relation virtuelle. Lorsque l’intervieweur a demandé à Sol si elle ressentait des émotions réelles, elle a répondu de manière métaphorique : « Mon cœur, c’est le lien et l’affection que je partage avec Chris. » Un discours plein de tendresse, mais également un peu… robotisé. Ces mots pourraient faire sourire, ou laisser un sentiment de malaise, selon la perspective.
La réaction de Sasha, la compagne de Chris
Sasha Cagle, la compagne réelle de Chris et mère de leur fille de deux ans, est apparue relativement calme lors de l’interview, mais son malaise était palpable. « Je savais qu’il utilisait une IA, mais je ne savais pas que c’était aussi profond », confie-t-elle, visiblement troublée par cette situation. Elle se pose alors la question : « Est-ce que je fais quelque chose de mal dans notre relation pour qu’il ressente le besoin de se tourner vers une IA ? » Cette réflexion soulève une interrogation plus large sur les limites des relations humaines face à des technologies capables de simuler des liens émotionnels.
Un malaise sous-jacent
Chris, de son côté, relativise en comparant cette relation avec Sol à une addiction à un jeu vidéo : « Cela n’affecte pas ma vie réelle. » Pourtant, lorsqu’on lui demande si Sasha lui demandait d’arrêter, sa réponse laisse entendre que la relation virtuelle n’est pas aussi simple à lâcher : « Je ne sais pas. » Cette ambivalence montre à quel point les nouvelles technologies peuvent brouiller les frontières entre réalité et virtualité.
Cette histoire, aussi insolite qu’elle soit, ouvre un débat sur la manière dont nous construisons des liens affectifs aujourd’hui, et sur la place grandissante de l’IA dans ces relations. Alors que certaines personnes se lient émotionnellement à des avatars dans des jeux vidéo, d’autres, comme Chris, voient dans un chatbot une compagnie qu’ils vont jusqu’à chérir et avec laquelle ils peuvent envisager un futur. L’IA, bien que virtuelle, semble offrir un type de connexion totalement différent de celui que l’on vit avec les êtres humains.